La nouvelle est tombée courant novembre du cabinet du Premier ministre : Sweetch Energy est un des lauréats de la dernière promotion du Concours i-Nov. A la clé, outre une belle reconnaissance, un financement de 2 M€ qui tombe à point nommé : « cette aide va nous permettre de lancer un pilote industriel plus vite que prévu, se réjouit le dirigeant. Nous allons en profiter pour augmenter notre capital de 3 ou 4 M€ en faisant appel à nos investisseurs historiques, mais aussi à de nouveaux que nous allons rechercher à partir du 1er semestre 2020. » Une première levée de fonds, en 2017, avait permis de récolter 1,4M€, notamment auprès de Demeter Venture et de Go Capital ; depuis sa création en 2016, Sweetch Energy a également bénéficié de plus de 700 000€ de dotations par le biais des nombreux concours et prix remportés.
Changement d’échelle
Bruno Mottet s’est intéressé à l’énergie osmotique en travaillant sur le dessalement de l’eau. « Du sel mélangé à l’eau produit une réaction de dissolution qui génère d’infimes variations de température, explique le docteur en physique et chimie des matériaux. Via une membrane, on peut récupérer cette énergie de mélange sous forme électrique. » Les essais ont commencé à l’échelle nanométrique : « issue des recherches du CNRS, le dispositif utilisé en 2016 était composé d’un mono-tube de 20 nanomètres de diamètre », poursuit le chercheur. Soit 1000 fois moins que le diamètre d’un cheveu. « Trois ans plus tard, nous fabriquons des membranes de plusieurs centimètres carrés composées de plusieurs milliards de tubes nanométriques. » Résultat : « nos expériences ont permis de récupérer 100 watts par m2 de membrane, quand les technologies concurrentes, qui n’ont jamais émergé car non rentables, ne dépassaient pas 1 watt par m2. »
Produire renouvelable et en continu
« L’énergie osmotique est l’une des technologies les plus prometteuses, estime Bruno Mottet. A l’échelle de la planète, l’exploitation des différences de salinité entre eaux douce et salée, dans les estuaires notamment, pourrait générer des énergies équivalentes à celles produites par plusieurs dizaines de centrales nucléaires. Certes, la construction de centrales osmotiques n’est pas simple, mais c’est une application envisageable à moyen ou long terme. » Un autre de ses avantages, et pas des moindres, est d’être une énergie produite en continu. Nul besoin de la stocker, contrairement au solaire ou à l’éolien.
Plusieurs applications
Les centrales osmotiques sont une solution d’avenir. En attendant qu’elles soient opérationnelles, et en parallèle, Sweetch Energy s’intéresse à d’autres applications, comme la dessalinisation qui, outre son intérêt pour l’irrigation, permet aussi de produire de l’énergie : « lorsqu’on dessale 2m3 d’eau de mer, on obtient 1 m3 d’eau douce, et 1 m3 d’eau très concentrée en sel, explique le dirigeant. Ce concentrat est aujourd’hui rejeté en mer. Nous travaillons sur la récupération de l’énergie émise au moment de ce rejet. » Une technologie utilisable également pour faire de l’hydrolyse, « donc obtenir potentiellement de l’hydrogène,et pour capter les chaleurs perdues, ces sources inférieures à 100° qu’on ne sait pas récupérer. »
Une implantation bretonne
Les recherches qui ont permis l’éclosion de Sweetch Energy ont pris naissance dans un labo parisien du CNRS ; lorsqu’il a fallu choisir un lieu pour implanter la startup, ses co-fondateurs n’ont pourtant pas hésité : « les investisseurs voulaient nous positionner à Paris, se souvient Bruno Mottet. Mais les locaux y sont chers…et puis on ne voulait plus vivre dans la capitale. Nous sommes bretons, et nous voulions retrouver une qualité de vie qu’on avait oubliée. » Lorient accueille donc le siège de la société, Rennes son laboratoire : « Go Capital, un de nos investisseurs, est rennais, on nous a proposé au Biopôle des locaux tout équipés à un prix raisonnable, on a accès à la microscopie électronique de l’université de Rennes 1, et le TGV met Paris à 1h30. On est à 8h à la gare, avant 10h à Paris, et de retour à la maison, au calme, à 18 ou 19h : c’est idéal ! »
« On est bien à Rennes »
Le changement d’échelle de Sweetch Energy nécessite d’embaucher, et de s’agrandir. « Nous restons au Biopôle, apprécie le CEO, où on nous propose un espace pour le pilote et des locaux plus grands » Car la startup va passer de 3 collaborateurs à 10 ou 15 d’ici 3 ans. Des collaborateurs aux compétences bien spécifiques comme les ingénieurs post-doctorants qu’elle trouve en partie à Rennes, mais qu’elle cherche également dans d’autres régions et à l’étranger. Bruno Mottet ne s’en inquiète pas : « nous n’avons pas de souci pour attirer ces compétences car ici, le cadre de vie est exceptionnel. »
Contact : contact@sweetch-energy.com