Le domaine des enchères a été fortement mis en lumière par des émissions de télévision ces dernières années. Comment cela a-t-il impacté son image ?
La vente aux enchères s’est beaucoup démocratisée ces dernières années. L’émission « Un trésor dans votre maison », lancée en 2010, y a fortement participé, comme plus tard, l’émission « Affaire conclue ». Si elles ont donné une grande visibilité à la vente aux enchères, elles ne représentent toutefois pas la réalité. Mais les gens ont commencé à s’intéresser à la valeur de leurs objets de famille et de leur patrimoine familial. C’est une bonne chose, car énormément d’objets sont jetés en France.
Notre rôle est donc de sensibiliser les Français à la vente aux enchères, pour que nos objets restent sur le territoire plutôt que de partir à l’étranger, comme c’est beaucoup le cas aujourd’hui. Il est important que nous préservions notre patrimoine, même si la tendance de la décoration aujourd’hui est au minimalisme. L’on peut acheter moins, mais mieux. Toute visibilité est donc bonne à prendre !
(Photo : Rennes Enchères Gwenaëlle Leboulzenec)
En quoi la digitalisation de votre activité a changé votre métier ?
En dehors des collectionneurs et marchands, type antiquaires, dont l’activité est de vendre des objets, notre clientèle était composée de personnes ayant du temps, donc plutôt retraitées. Mais depuis quelque temps, avec la digitalisation de notre activité, et notamment depuis la période de confinement, nous avons développé une clientèle plus jeune. Le secteur a même progressé de 12 % en 2020 avec plus de 3 milliards d’euros de CA. Aujourd’hui, pratiquement 70 % de nos ventes se font en ligne et tout le monde peut enchérir à condition d’être majeur.
Avec l’arrivée du digital, la vente aux enchères n’est plus réservée aux seuls initiés. Interenchères est une plateforme de diffusion en live (une technologie développée par une entreprise bretonne). Il s’agit de diffuser en temps réel une vente physique à laquelle tout le monde peut également participer en ligne. Certes, cette concurrence des particuliers rend la tâche plus difficile aux acheteurs professionnels qui soutiennent toujours le marché de l’art… Mais cela permet aux salles des ventes en province de vendre aussi bien qu’à Paris !
Et pour les acheteurs, les plateformes permettent d’avoir une belle visibilité sur les lots avec de nombreuses photos sur lesquelles zoomer. A chacune de nos ventes par exemple, 1500 photos sont diffusées sur le net. Pour les commissaires-priseurs, cela permet de faire des économies sur les coûts d’impression et d’expédition des catalogues papier, de toucher un public plus large et de digitaliser leur process.
Parlez-nous des métiers liés à la vente aux enchères…
La vente aux enchères est un métier de fourmi ! Avant sa vente, un objet sera manipulé une dizaine de fois : estimation, transport, stockage, description, nouveau stockage, photographie, scénographie pour l’exposition, film pendant la vente, nouveau stockage, puis expédition ! Dans notre métier, la rigueur est de mise avec l’étiquetage et l’enregistrement systématique des objets.
Dans une maison de ventes, on trouve généralement un chargé d’accueil ; un comptable acheteur/vendeur ; un graphiste qui réalise les catalogues ; le commissaire-priseur ; un ou plusieurs clercs (collaborateurs du commissaire-priseur habilités à communiquer les estimations aux vendeurs et à prendre les ordres d’achat) ; les personnes en salle qui accueillent le client, rangent les objets, dressent les procès-verbaux ; un régisseur son et lumière (et pour la diffusion en live). Il y a aussi le crieur quand le commissaire-priseur ne souhaite pas « fatiguer sa voix » mais ce métier est spécifique aux ventes aux enchères Drouot à Paris. Ici, c’est moi, le commissaire-priseur qui joue ce rôle et anime la salle des ventes avec mon marteau !
Rennes Enchères est forte d’une équipe de 7 personnes pour faire tout cela, et aidée de différents experts indépendants auxquels nous faisons appel pour authentifier et estimer l’objet. Des experts en tous domaines, dont certains d’un seul artiste. Ils ont un statut particulier et font partie d’un syndicat professionnel mais il n’y a pas de diplôme spécifique puisque c’est l’expérience qui fait l’expert.
Nous travaillons également avec des photographes indépendants ; des transporteurs, des scénographes ; des caméramans pour le jour de la vente… Toutes nos ventes sont en effet rediffusées en live et pour chaque objet, nous proposons 2 à 3 photos.
Le secteur des enchères recrute-il et si oui, dans quels métiers ?
Nous réfléchissons plutôt en termes de profils que de diplômes : il faut être curieux, avec un goût pour les objets et leur histoire. Mais avant tout, des communicants ayant une forte appétence pour le digital, la communication et les réseaux sociaux. Avoir le sens du conseil à la clientèle et de l’écoute est évidemment un atout. En somme, nous recherchons des personnes polyvalentes car si nous gérons un très large volume d’objets, la plupart des maisons de vente en France sont de petites structures de 2 à 5 personnes, qui ne peuvent se permettre d’avoir une personne en interne sur chaque poste.
Nous recrutons dans tous les domaines mais la formation est longue. Notre objectif est donc de déclencher des vocations, c’est pourquoi nous recrutons beaucoup d’étudiants en stage. Nous recherchons avant tout des passionné(e)s.
- Découvrez la vente aux enchères et ses métiers à l’occasion de l’expo-vente « Nature & Merveilles » du 21 au 24 février 2022 à la Halle Martenot.
- En savoir plus sur la vente aux enchères dans notre précédente interview de Carole Jézéquel.
