Le dernier Baromètre LinkedIn s’est intéressé aux mobilités géographiques des professionnels depuis la crise : comment la pandémie a-t-elle redessiné la carte de France des villes attractives ? Dans quelles villes les arrivées se sont-elles accélérées le plus depuis 1 an ? Dans quels secteurs les professionnels, qui choisissent de s’installer hors IDF, sont-ils le plus susceptibles de travailler ? Autant de questions auxquelles le réseau social a souhaité répondre en analysant le comportement de ses membres à l’aide d’un sociologue.
A la recherche d’une meilleure qualité de vie
« Les envies de nature et d’espace des professionnels étaient déjà de plus en plus fortes avant le Covid-19 » selon Jean Viard à LinkedIn Actualités, auteur de « La révolution que l’on attendait est arrivée » (Editions de l’Aube). Pour le sociologue, « ceux qui ont décidé de bouger la première année étaient déjà mûrs pour le faire. Mais le mouvement va se poursuivre, car la crise a amené davantage de professionnels à se poser des questions sur le sens de leur vie. »
Depuis avril 2020, les départs de Paris se sont accélérés, tandis que les villes moyennes et les métropoles méditerranéennes ont gagné en attractivité. Ainsi, d’après cette première édition du baromètre LinkedIn de l’emploi, les villes où les arrivées accélèrent le plus depuis un an sont Marseille, Montpellier et Rennes. A contrario, les départs en provenance de Paris sont de plus en plus nombreux depuis le début de la crise sanitaire. D’une manière générale, le taux de migration interne a connu une forte accélération au deuxième trimestre 2020, avec un pic au mois de septembre, et la tendance se poursuit début 2021 (avec un taux 38% supérieur par rapport aux 5 premiers mois de 2020).
Rennes, « ville du 15 minutes »
Juste derrière Marseille, Montpellier et Rennes, les villes jumelles, sont en 2e et 3e position. Figurant régulièrement dans les classements des villes les plus attractives, elles répondent parfaitement aux besoins des professionnels en recherche de mobilité et d’une meilleure qualité de vie. Illustrant le concept de « villes du 15 minutes », elles offrent une très grande accessibilité : du bureau à l’école, en passant par les espaces verts, tout y est accessible en quelques minutes à pied ou à vélo !
Un réseau de transports en commun performant, des vélos en libre-service (les premiers créés en France), une ligne de métro (et bientôt d’une deuxième), une « taille humaine », des liaisons quotidiennes avec Paris en seulement 1h25 par le TGV, un aéroport, une proximité avec la côte et la nature… Rennes a tout d’une grande métropole, les inconvénients en moins, et la proximité de la mer en plus ! On peut s’installer en cœur de ville, mais également en périphérie, à la campagne, en conservant un temps de transport raisonnable par rapport à d’autres métropoles.
Certains secteurs d’activité offrent davantage de liberté
Selon le baromètre, les membres travaillant dans le secteur du retail (grande distribution, commerce de détail…) étaient 16 % plus nombreux à avoir opté pour une nouvelle ville parmi les plus attractives la première année du Covid, si l’on compare avec l’année précédente. Le dynamisme de la grande distribution pendant la crise sanitaire peut expliquer cette tendance. Parmi les autres secteurs ayant observé une mobilité accrue, on trouve également l’éducation (+10 %), le tourisme (+8,3 %) et les médias-communication (+3,7 %).
Habituellement réputées pour leur qualité de vie, Toulouse et Strasbourg sont les villes où le nombre de départs a le plus progressé durant la crise sanitaire, après Paris. Les secteurs qui portaient une grande partie de l’économie ont en effet énormément pâti de la crise sanitaire : le secteur aéronautique pour Toulouse, avec un plan social chez Airbus et des centaines de départs volontaires à Toulouse et Blagnac. Pour Strasbourg, le recul de l’attractivité de s’inscrit dans le contexte d’une région Est en crise “faute d’avoir trouvé un nouveau modèle après l’âge d’or industriel” analyse le sociologue Jean Viard.
Quand le lieu d’habitation prend ses distances du lieu de travail
Autre phénomène : de plus en plus d’actifs parisiens déménagent sans pour autant quitter leur entreprise. On estime à 60 % de la population d’Ile-de-France ayant la possibilité de télétravailler, contre seulement un tiers des professionnels sur l’ensemble du territoire. Le travail à distance, qui s’est démocratisé, a ouvert la porte de nouveaux modes de travail dans lesquels le présentiel n’est plus la norme. Ainsi, on recherche un logement en région mais pas – ou plus – forcément un emploi. « Reste à savoir si ceux qui ont déménagé tout en gardant leur emploi, grâce au recours partiel ou total au travail à distance, finiront par chercher un nouveau poste plus proche de leur domicile » questionne LinkedIn.
A Rennes, la proximité avec Paris (1h25 seulement par la LGV) a de quoi convaincre n’importe quel travailleur en quête d’une meilleure qualité de vie d’y emménager pour se rendre 1 à 2 fois par semaine à la capitale pour le travail et le reste du temps, travailler chez lui ou au sein d’un espace dédié, en communauté. Adaptés aux travailleurs nomades, les espaces de coworking et flex office se développent, leur évitant un isolement trop important. Pour Jean Viard, sociologue, « les professionnels pourraient se rendre deux à trois jours par semaine dans ces lieux de sociabilisation, afin de tisser des liens sociaux et de recréer ce qui pourrait se rapprocher de relations de bureaux ». On dénombre actuellement 1800 tiers-lieux dans l’Hexagone et à Rennes, les espaces de coworking sont nombreux.
Encore loin d’une ruée vers l’Ouest
Cette mobilité des compétences a de quoi ravir les entreprises bretonnes, notamment dans le numérique ou la cybersécurité. Mais du point de vue de l’immobilier, les ex-franciliens et néo-rennais sont montrés du doigt, accusés de faire grimper les prix de l’immobilier à Rennes et en Bretagne.
On est toutefois loin de la ruée vers l’Ouest tant décriée. Selon le dernier Baromètre Immobilier des Notaires bretons*, les Bretons restent les premiers acquéreurs de biens dans la région. Lors d’une conférence de presse le 24 juin 2021, Olivier Arens, président du Conseil Régional des Notaires de la Cour d’Appel de Rennes, expliquait ainsi : « On ne note pas une hausse significative de la part des Franciliens dans les transactions. Ils ne sont pas plus nombreux aujourd’hui malgré le ressenti. »
Sur la zone Bretagne + département 44, seulement 7 % des acquéreurs sont originaires de l’Ile-de-France, soit le même taux qu’en juin 2020. 10 % viennent du reste de la France. 1 % de l’étranger. La plus grande part des acquéreurs vient de la région, du département ou de la même commune que le bien acquis (*période juin 2020 > juin 2021). « La Bretagne offre à ses résidents comme à ses amoureux une grande variété de biens (villa, longère, maison en lotissement ou appartement), de situations (proximité de la mer, cœur de ville, de bourg ou pleine campagne) à des prix très différents mais qui permettent au plus grand nombre d’accéder à la propriété » rappelle Olivier Arens.
- Consultez le Baromètre LinkedIn de l’emploi
(Photo de Une : Destination Rennes – Franck Hamon)